Elton Oil existe depuis 23 ans. Quel regard portez-vous sur le chemin parcouru ?
Avec le recul et au vu des nombreux défis relevés, nous pouvons être fiers de ce que nous avons réalisé. Partis de zéro, nous avons conçu et construit une grande société pétrolière que nous gérons avec les normes les plus élevées. ELTON réalise un chiffre d’affaires de plus de 300 milliards et figure aujourd’hui dans le TOP 10 des plus grandes entreprises sénégalaises.

En 23 ans, nous avons développé une entreprise de référence avec une marque forte et appréciée. ELTON est devenue l’emblème des entreprises sénégalaises qui gagnent. Elle est la preuve que les Sénégalais sont capables de construire une entreprise performante et innovante. Elle est devenue une fierté pour les Sénégalais et la plupart d’entre eux se reconnaissent en elle. Cette reconnaissance nous honore en même temps qu’elle nous oblige.

Comment voyez-vous l’avenir ?
Nous avons fait un grand pas et il reste beaucoup à faire. Le chemin est long. Nous devons continuer notre marche en avant sans nous fixer de limite. Notre devoir est de faire franchir d’autres paliers à ELTON, en explorant d’autres chemins de croissance. Nous avons de grandes ambitions pour le Sénégal et pour l’Afrique. C’est pourquoi, nous avons dupliqué le même modèle en créant des filiales en Guinée et en Côte d’Ivoire. En ce moment, d’autres projets sont en cours de finition ou de réalisation au Sénégal ; je peux citer le dépôt pétrolier de Bargny Sendou ou le terminal de gaz naturel liquéfié au port de Dakar. Vous le savez tous, l’ADN des entreprises qui gagnent, c’est d’essayer de toujours avoir un temps d’avance sur la concurrence. Nos ambitions, nous les poursuivons chaque jour dans nos actes et décisions, en essayant de « voir grand » et de « voir loin ».

Avec la détermination et la conscience qui nous caractérisent, j’ai la certitude qu’aucun défi ne nous est insurmontable. Notre honneur est de ne pas décevoir et nous ne décevrons pas.

Quel a été votre secret pour arriver à bâtir une entreprise aussi performante ?
Le secret pour réaliser ses ambitions, c’est un peu de talent et beaucoup de travail. Si ELTON est citée en référence, c’est parce qu’elle inspire confiance. Selon nos enquêtes, elle est perçue comme une entreprise innovante, orientée qualité de service, vertueuse et citoyenne. Notre état d’esprit fait que chacun de nous est conscient que l’entreprise ne tourne pas autour de sa personne et que le succès de chacun dépend de la réussite de l’entreprise. Nous valorisons tous nos collaborateurs et de fait il s’est créé un sentiment d’appartenance très développé. En plus, comme dirigeants de l’entreprise, nous ne mettons pas en avant nos personnes mais plutôt notre entreprise. D’ailleurs, rares sont ceux qui nous connaissent. Nous devons rester humbles et donner l’exemple par notre engagement, notre transparence et notre éthique. Dans son fonctionnement, tout ce qui affecte la tête de l’organisation affecte forcément son corps. C’est pourquoi on dit que ‘’ le poisson pourrit par la tête’’.

Que diriez-vous à un jeune entrepreneur qui viendrait vous demander conseil ?
En lieu et place de conseils, je partagerai avec lui certaines convictions tirées de mon expérience. D’abord, quand on veut entreprendre, il faut s’affranchir des barrières psychologiques qui brident nos ambitions, comprendre que le talent ne dispense pas de l’effort et être concentré sur son projet ou sur son business. Ensuite, il faut éviter de placer sa personne au-devant et comprendre que ce qui est important, c’est l’entreprise, la marque, le produit, le client. Enfin, il faut avoir une vision claire parce qu’il n’y a pas de vent favorable pour celui qui ne sait pas où il va. Ce que nous avons fait dans le pétrole, d’autres jeunes sénégalais peuvent bien le faire dans d’autres secteurs. J’encourage vraiment les jeunes à entreprendre sans complexe dans tous les domaines ; le pays a besoin d’entrepreneurs et de champions nationaux pour émerger. Ma conviction est qu’il est possible de bâtir un Sénégal d’entrepreneurs. L’entreprise n’est qu’une graine et son terreau, c’est l’environnement. Si l’Etat crée un environnement de business favorable, d’autres graines comme ELTON pousseront dans d’autres secteurs.

Est-ce que tout le monde peut devenir entrepreneur ?
C’est comme si vous me demandez est ce que tout le monde peut devenir footballeur ou musicien ou romancier ou ingénieur. Naturellement, la réponse est non parce qu’on n’a pas tous les mêmes prédispositions. Être entrepreneur, c’est d’abord un état d’esprit qui accepte la prise de risque. L’entrepreneur ne doit pas craindre l’échec. Je dirai même que l’échec est un élément du processus qui mène au succès. Chacun de nous peut réussir dans son projet d’entreprise pour autant qu’il ait du talent et de la passion et qu’il accepte de sortir des sentiers battus et de sa zone de confort. Le point commun des entrepreneurs qui réussissent est qu’ils acceptent de souffrir d’un mal incurable : l’optimisme. Le reste n’est qu’une question de travail et d’effort. L’effort est l’énergie qui transforme le talent en succès.

75% de la population sénégalaise a moins de 35 ans. Cela peut être une force ou un péril en termes de marché et d’emplois à créer. Quel est votre avis sur la question ?
J’ai un avis mitigé sur cette question. Le Sénégal a une population jeune, c’est une chance contrairement aux pays européens. Avoir 75% de sa population âgée de moins de 35 ans et 57% âgée de moins de 19 ans peut être un atout si, par un système éducatif performant, l’Etat en fait des cerveaux bien structurés. En revanche, cet atout peut se transformer en un boulet si cette jeunesse, dépourvue de formation n’a que la force de ses bras. Pour faire une comparaison, c’est comme un médicament ; bien utilisé, il soigne, mal utilisé il peut être dangereux. Une population jeune constitue un avantage concurrentiel pour tout pays à la double condition qu’elle soit bien formée et qu’on lui offre des perspectives, de l’espoir dans un environnement favorable à l’éclosion des talents et à la réalisation des ambitions de chacun. Inversement, une jeunesse non ou mal formée, devient fatalement un poids pour la société et une bombe démographique à retardement pour tout régime si les seules options qui s’offrent à elle sont l’émigration clandestine par les pirogues ou conducteurs de ‘Jakarta’. Capter le dividende démographique de notre jeune population doit être la priorité de tout gouvernement. Cela suppose d’investir massivement dans les cerveaux par l’éducation et d’instaurer une société méritocratique, par une gestion vertueuse et transparente de l’Etat.

Dans votre carrière, quelle est la chose la plus importante que vous ayez apprise ?
J’ai appris beaucoup de choses que j’ignorai et j’ai aussi appris à relativiser beaucoup de mes certitudes. C’est difficile de hiérarchiser mais une chose primordiale dans le business, c’est de bâtir une relation de confiance avec les partenaires, quels qu’ils soient : banques, clients, fournisseurs, Administration, collaborateurs, actionnaires, … La confiance des partenaires envers votre personne ou envers votre entreprise est un actif. Pour autant, elle ne se décrète pas, on vous l’accorde par mérite. Cela suppose le respect de la parole donnée et des engagements pris ; cela suppose aussi d’avoir le sens de la relation gagnant-gagnant. S’engager de bonne foi dans tout ce qu’on fait et ne prendre que des engagements qu’on peut respecter ouvre les portes de la confiance. Je préfère négocier très dur et après, respecter l’intégralité de l’esprit du contrat signé ou oral. Une relation de confiance est fondamentale pour un partenariat durable. La confiance entre parties permet de trouver des solutions équilibrées, créatrices de valeur pour chacune des parties. Un dirigeant qui perd la confiance de ses partenaires devient un passif pour son entreprise avec un risque réputationnel dont le coût peut être très élevé.